David SAUSSIER
Les sciences au Moyen Âge et la médecine médiévale
Le haut Moyen Âge fut une période sombre pour l'Occident. Tandis que l'Europe se remet lentement des invasions et des guerres, les principaux progrès scientifiques se développent alors surtout dans les civilisations indienne et arabo-musulmane. Inspirée d'abord par les penseurs grecs, la science médiévale commence peu à peu à marquer une rupture avec l'aristotélisme, ouvrant la voie à la méthode scientifique moderne.
Les savants indiens

Au VIIe siècle, Brahmagupta (598-670) dirige l'observatoire astronomique de la ville sainte d'Ujjain, centre majeur de recherche mathématique. Il est surtout connu pour avoir formalisé le chiffre zéro, qu'il définit comme étant le résultat de la soustraction d'un nombre par lui-même, lui donnant ainsi une véritable place dans les calculs.

Il développe l'algèbre en résolvant des équations linéaires (a·x + b = 0), travaille sur les équations du second degré (a·x2 + b·x + c = 0), et s'illustre par des idées révolutionnaires comme l'affirmation que la Terre est ronde, ce qui semblait absurde pour ses contemporains, et que les objets sont attirés vers son centre. Une conception préfigurant la notion de gravité, bien avant Newton.

Plus tard, les indiens développeront la notion d'infini et résoudront des équations plus complexes, posant les bases de l'algèbre moderne.
Leurs travaux influenceront directement les savants arabo-musulmans.

L'âge d'or des sciences arabo-musulmanes

L'expansion rapide de l'empire musulman met les Arabes en contact avec diverses civilisations : grecque et byzantine à l'Ouest, perse au centre, et indienne à l'Est. Les conquêtes militaires, religieuses, et les échanges commerciaux permettent une immense circulation des savoirs.

Dès le IXe siècle, Bagdad devient la capitale intellectuelle du monde musulman. Les califes abbassides fondent la célèbre Maison de la Sagesse (Bayt al-Hikma), véritable centre de traduction et de recherche, où des érudits de tout horizons travaillent ensemble. C'est là que de nombreux textes grecs et persans sont traduits en arabe, puis commentés, améliorés et diffusés.
La Maison de la Sagesse devient un lieu incontournable et un des symboles de l'âge d'or de la science arabe.

Les savants arabo-musulmans développent brillamment les mathématiques (algèbre, trigonométrie, théorie des nombres, suites et séries, ...), l'astronomie, la médecine, l'optique, la chimie ou l'ingénierie. Les rendements agricoles se perfectionnent grâce au développement de l'hydraulique. Ils décrivent les mouvements célestes, expérimentent sur de nouveaux composants chimiques, ou encore révolutionnent l'optique en introduisant l'expérimentation et le calcul mathématique. La pharmacopée, la distilation, ou la botanique, les connaissances arabo-musulmanes se développent dans tout les domaines.
L'introduction de la méthode expérimentale et du raisonnement logique prépareront la révolution scientifique européenne.

Les hôpitaux musulmans apparaissent très tôt. On y soigne non seulement les maladies physiques, mais aussi les troubles mentaux, avec une approche plus humaine et scientifique qu'en Europe à la même époque.

L'optique est profondément renouvelée par des savants comme Ibn al-Haytham (Alhazen), qui démontre que la lumière entre dans l'œil (et non l'inverse, comme le croyait Ptolémée). Ses expériences influenceront directement les scientifiques européens comme Kepler et Newton plusieurs siècles plus tard.

Quelques grands noms
  • Al-Khwarizmi (IXe s.) : fondateur de l'algèbre, son nom a donné le mot « algorithme ».
  • Banu Musa (IXe s.) : ingénieurs et astronomes, réfutent Aristote et unifient les lois célestes et terrestres.
  • Avicenne (Ibn Sina) (Xe–XIe s.) : philosophe et médecin persan, auteur du Canon de la médecine, référence majeure en Europe et au Moyen-Orient jusqu'au XVIIe siècle.
  • Averroès (Ibn Rushd) (XIIe s.) : philosophe andalou, insiste sur l'observation et l'expérience en médecine.
  • Ibn al-Haytham (Alhazen) (Xe–XIe s.) : père de l'optique moderne et pionnier de la méthode expérimentale.
Retour en Occident : la redécouverte des savoirs

À partir du XIIe siècle, l'Europe occidentale commence à redécouvrir les savoirs antiques et arabes grâce aux traductions, notamment en Espagne (Tolède) et en Sicile. Les universités se développent (Bologne, Paris, Oxford), devenant des foyers de diffusion des connaissances.

Des savants comme Roger Bacon (XIIIe siècle), moine franciscain anglais, plaident pour l'usage de l'expérimentation et des mathématiques dans la recherche scientifique. Il est parfois considéré comme un précurseur de la méthode scientifique moderne.

Cette transition annonce la Renaissance, où l'héritage des civilisations indienne, arabe et grecque se mêle pour donner naissance à la science moderne européenne.